Pénurie de personnel ou sabotage ?

Depuis plusieurs mois, les cris de détresse et les appels à l’aide se multiplient dans le système de santé. L’une des causes est le manque de personnel. Le CHUM ne fait pas exception, il manque de monde dans tous les départements, pour tous les titres d’emploi.

La principale conséquence pour nous est une surcharge de travail et tout ce que cela entraîne comme conséquences: épuisement, accident, écœurement, etc.

Même quand nous réussissons à démontrer qu’il manque de personnel, la réponse est toujours: «Il n’y a personne», «Liste de rappel épuisée», «Manque de budget»…Nous sommes coincés. Que pouvons-nous y faire ?

Le privé siphonne le public

Premièrement, il faut dire clairement que ce n’est pas vrai. Il est normal d’avoir moins de services si les budgets pour la santé sont constamment réduits, ce qui est le cas depuis plus d’une décennie. Dénoncer la pénurie de personnel sans réinvestir est un non-sens. C’est pourtant ce qu’a fait le PLQ et ce que propose la CAQ. Deuxièmement, il ne manque pas de personnel. Il ne travaille pas pour le public, nuance importante.

Garda peut mobiliser des dizaines de travailleurs en quelques heures lorsque les VAG tombent en panne. Le CHUM a les ressources pour avoir 887 bénévoles [1]. Il y a des gens qui se font engager mais ne se font pas appeler alors qu’il y a des quarts de disponibles. Il y a près de 250 000 chômeurs au Québec…

Pourquoi les cliniques privées, elles, ne manquent pas de personnel ? À certains endroits, lorsque la liste de rappel est épuisée, ce sont des travailleurs d’agences qui prennent le relais. Les agences de placement pour tous les titres d’emploi en santé et services sociaux explosent depuis quelques années.

Aux dernières nouvelles, le privé n’est pas encore capable d’inventer des personnes !

Selon la nouvelle ministre de la Santé, Danielle McCann, le privé doit demeurer en place tant qu’il y aura des problèmes d’accès au public [2]. Il est où le journaliste pour lui demander si le manque de ressources au public est peut-être dû au fait que le privé en santé existe ?

Si un médecin fait 4 heures au privé et 4 heures au public, cela représente 4h d’attente de plus pour le public.

Pourquoi faire cela ?

L’objectif est simple, il suffit d’asphyxier financièrement le public pour le rendre moins attractif et réduire l’offre de services pour ainsi permettre au privé d’arriver «en sauveur».

Pour régler le problème, il faut tout simplement que les gouvernements en place veuillent d’un service public de qualité. Le PLQ et la CAQ n’en veulent pas. Ils ne le disent pas clairement pour ne pas perdre leurs élections, mais les décisions qu’ils prennent parlent pour eux. Ce n’est pas pour rien que Barrette a créé les GMF et que la CAQ veut des maisons des aînés privées.

Lorsque l’État délaisse les services publics, cela permet à l’entreprise privée de venir faire de l’argent. Pour nous, vouloir faire de l’argent avec la maladie, c’est malsain, voire amoral, mais pas pour eux.

Que pouvons-nous y faire ?

Localement, l’idée du président du SECHUM, Claude Talbot, qui, depuis plus de 2 ans, défend l’idée d’une école de PAB, fait son chemin. La première cohorte est en formation et nous espérons que l’expérience va se renouveler. Pourquoi ne pas élargir l’idée à d’autres titres d’emploi ?

Plusieurs étudiants et étudiantes réclament des stages rémunérés. Pour faciliter l’accès à différentes techniques, c’est essentiel. Mais pour favoriser la rétention et le recrutement de façon durable, il faut D’ABORD améliorer les conditions de travail ! La prochaine ronde de négociation s’en vient à grands pas. Nous devrons nous mobiliser pour défendre nos intérêts.

Cela ne serait pas une mauvaise idée non plus d’arrêter d’élire des boss qui veulent simplement faire la piastre et élire des gens comme nous au gouvernement, des travailleurs et des travailleuses.

Bruno-Pierre Guillette

Sources:

[1] Radio-Canada, Le CHUM 6 mois plus tard, En ligne [https://ici.radio-canada.ca/info/videos/media-7893206/chum-6-mois-plus-tard]
[2] TVA Nouvelles, 14 novembre 2018.

Pour en savoir plus:

Julia Posca, Pénurie de main-d’œuvre : des nuances s’imposent, Journal de Montréal, 9 janvier 2019.
_, Pénurie de main-d’œuvre : des nuances s’imposent (encore), Journal de Montréal, 16 janvier 2019.
Conseil confédéral CSN, État de situation et perspectives :pénurie de main-d’œuvre, 21 et 22 mars 2018, [En ligne] https://www.csn.qc.ca/wp-content/uploads/2018/04/conseilconf_20180321_ppt_rarete-m-oeuvre_v2.pdf