Tout ce qui nous divise nous affaiblit : les syndicats et la lutte antiraciste

Vous ne trouvez pas ça ridicule que nous tolérons des bandits à cravates qui nous volent à tour de bras, mais on s’insurge pour un morceau de tissu ou les habitudes alimentaires des gens ?

Vous vous rappelez la ridicule saga d’Hérouxville ? Des «accommodements raisonnables» ? De la super «charte des valeurs» ? Les médias jouent beaucoup avec les questions identitaires, en montant en épingle les demandes les plus ridicules de quelques personnes pour nous faire détester tout un groupe.

Le problème ce sont les banquiers, pas les immigrés !

Tout cela entraîne un climat malsain, qui frise la paranoïa pure et simple. À qui cela profite-t-il ? À ceux et celles qui gagnent des millions en paradis fiscaux, qui pillent nos ressources naturelles, détruisent notre environnement et tirent profits de la privatisation des services publics.

Eux, comme toujours, sont prêts à tout pour ne pas trop attirer l’attention sur leurs rackets. La stratégie est simple et existe depuis toujours : diviser pour mieux régner. Il suffit d’inventer un bouc émissaire et de taper dessus constamment.

Il y a pas si longtemps, le «danger», c’était les juifs, les espagnols, les italiens, les irlandais, les noirs et, à d’autres moments, ce fut les communistes, les jeunes, les gay, les femmes…et j’en passe ! Aujourd’hui, ce sont les musulmans, ou tout ce qui s’en rapproche.

Sérieusement, est-ce que l’islam radical est vraiment la plus grande menace en ce moment ? Si oui, alors pourquoi le Canada construit des armes pour l’Arabie Saoudite, un pays où les femmes n’ont même pas le droit de conduire ? Pourquoi nous n’aidons pas davantage les kurdes qui combattent presque seuls l’État islamique depuis des années ? Les seuls québécois partis réellement combattre l’EI, c’est précisément les «gauchistes-zinclusifs» que détestent tant les chroniqueurs des radios poubelles.

Soyons sérieux, les changements climatiques ont le temps de détruire la planète 1000 fois avant que l’Abitibi ou le Saguenay soient envahis «d’islamisss». Ce que raconte la Meute, c’est n’importe quoi, ils prétendent vouloir défendre «nos droits et libertés» et la «liberté d’expression» par la répression des idées des autres….

Est-ce que cela veut dire que nous devons tout tolérer ? Évidemment que non. Le mouvement syndical défend depuis toujours l’égalité hommes-femmes, une vision laïque de la société et condamne fermement toute forme d’intolérance. Ce n’est pas en piquant des crises d’hystérie chaque fois que nous voyons le mots «halal» que nous allons défendre la liberté et l’égalité, mais par la construction d’un mouvement syndical fort.

La lutte antiraciste est une lutte syndicale

Les commentaires racistes sont de plus en banalisés dans les médias, cela prend de plus en plus de place sur le plancher et cela ne peut que nuire à notre action syndicale. En tant que syndicalistes, nous devons jouer un rôle de premier plan dans la lutte antiraciste et l’intolérance. Par notre contact quotidien avec nos collègues, nous avons un lien privilégié pour intervenir. Il faut le faire.

Pour améliorer nos conditions de vie et de travail, nous devons combattre tout ce qui nous divise inutilement. Le mouvement syndical a donc un rôle de premier plan à jouer dans la lutte antiraciste.

Malheureusement, outre certaines prises de position en faveur d’une commission d’enquête sur le racisme systémique, le mouvement syndical est peu présent dans la construction du mouvement antiraciste. Il y a bien sûr différentes campagnes de sensibilisation, mais cela s’arrête là.

Quand l’intolérance prend la rue, le mouvement syndical ne peut pas rester les bras croisés et doit organiser la lutte, d’abord dans nos milieux de travail, mais également à l’extérieur de celui-ci par la construction d’un mouvement de masse démocratique contre l’extrême droite.

Bruno-Pierre Guillette, août 2017.